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Felk
21 février 2010

Le retour de la grande aventure !

La série « Dr Germaine », ce sont 391 tomes parus à ce jour.

Voici les premiers chapitres en avant-première du tome 392 : « Mystère à Brandes-en-Oisans ».

* Attention, cette histoire comporte un certain nombre de « privates jokes ». Pour mieux apprécier ce récit, revenez 5 années en arrière et intégrez notre groupe d’amis en faisant une licence d’histoire de l’art et archéologie à l’université de Nantes *

LES PERSONNAGES :

Les Dr. Germaine :

Florent : Florent est un jeune étudiant en histoire de l’art et archéologie. Il est bien souvent responsable des troubles temporels provoqués par le groupe d’amis lors de leurs voyages dans le temps. Il serait entre autre responsable de la fin de la civilisation maya bien avant la date prévue et de la mort de Louis XVI à l’âge de 4 ans (ce dernier meurt étouffé par un m&m’s offert par Florent). Il serait également le père de John Lennon, de Zinedine Zidane et de l’empereur romain d’orient Constantin Ier. Il suit actuellement une cure de désintoxication de kinder bueno, bounty et autre snickers.

Pierre : Pierre est un jeune alcoolique dépressif hypocondriaque adopté par le reste du groupe au cours de la première année d’histoire de l’art et archéologie. Pierre est un compagnon sur lequel on peut compter, les lecteurs assidus des aventures des Dr. Germaine le savent. A l’exception peut-être des tomes 232 (« Le Volcan infernal »), 131 (« L’androïde qui tuait ») et 257 (« Mortel contrat sur le bassiste »). Il est à noter que Pierre est capable de rédiger votre mémoire en une semaine, n’hésitez pas à le contacter via le présent blog.

Bélinor : Bélinor est un descendant direct du Christ et du chef viking Erik le rouge. Renié par Dieu dans le tome 347, il est désormais privé de ses facultés divines. Ses capacités de survie sont grandes et il est le porte-bonheur du groupe d’amis. Bélinor est un as de l’escalade. Il aura la vie sauve dans le chapitre 18 de cette aventure en escaladant une paroi rocheuse afin d’échapper à ses poursuivants assoiffés de sang.

Yann : PDG de la fédération mondiale de football de table, il est le doyen du groupe. Il a 30 ans. Décédé dans le tome 353, il est ressuscité suites aux menaces de mort envoyées à l’auteur de la série Dr. Germaine.

Simon Warrior : Simon est le premier batteur du groupe Dr. Germaine. Il continue de suivre ses amis dans leur aventures, lorsqu’il n’est pas à la Beaujoire (stade de Nantes d’où il assiste régulièrement aux défaites du Fc Nantes dans un froid glacial ou sous la pluie en compagnie de son ami Rémi).

Autres personnages :

Jean : Jean est un historien roux. Il est le chef de l’agence d’enquêtes spatio-temporelles. Il aime le ska, le jardinage et la bière. A cause de sa couleur de cheveux, il sera longuement torturé par les prêtres inquisiteurs espagnols de Torquemada dans le tome 386 « Tomàs de Torquemada : passion inquisition. ». Cependant, les prêtres ne savaient pas que Jean, victime d’une mauvaise grippe pendant sa jeunesse, ne ressent ni le froid, ni la faim, ni la soif, ni la chaleur, ni la douleur. Suite à la dépression nerveuse des bourreaux, Jean est libre de rejoindre ses amis, entretemps partis en randonnée au Portugal sur la suggestion de Pierre.

Christophe : Christophe est un céramologue aigri. C’est sa deuxième apparition dans une aventure des Dr. Germaine. Suite à un vote extrêmement défavorable des lecteurs envers ce personnage qui ne fait que râler et parler de céramique, Christophe sera dans le présent récit très vite expédié à une autre époque dont il ne reviendra probablement jamais, au grand soulagement de tous.

Hélène M. : Hélène est une jeune étudiante, amie des Dr. Germaine depuis leur rencontre à l’université de Nantes. Elle aime l’archéologie, le rugby, les ornithorynques et le saucisson.

Chapitre 1 : Un chantier de fouille bénévole cet été ?

- Le temps imparti est écoulé ! Veuillez terminer votre phrase et venir rendre vos copies, cria Louis-Paul Inuit, maître de conférences en histoire de l’art contemporaine à l’université de Nantes.

Cette phrase fut suivie de réactions diverses.

- Oh non ! Je viens à peine de terminer de rédiger ma fabuleuse intro, soupira Yann.

- Vite… vite… gémit Florent, dont le stylo plume commençait à glisser de sa main trempée de sueur.

- J’ai fait un hors-sujet, mais monsieur Inuit ne pourra que s’incliner en lisant le formidable scénario de ma toute dernière pièce de théâtre que j’ai rédigé sur mes 4 copies doubles, s’exclama Clément Bartinez.

- Quoi, déjà ?! Ce n’est pas possible ! Je refuse !! C’est un scandale, je réclame une heure de travail supplémentaire ! hurla une étudiante prise d’hystérie, tout en se roulant par terre secouée de convulsions.

Florent se leva, rendit sa copie d’histoire de l’art contemporain à Louis Paul Inuit et monta lentement les marches de l’amphithéâtre, à présent presque vide. Le sujet avait été particulièrement complexe et beaucoup d’étudiants étaient partis rapidement.  Florent sortit et se dirigea vers la cafétéria où il commanda un paquet de m&m’s et une canette de coca.

- Et voila… je suis encore le dernier à sortir… soupira Florent. Maintenant il s’agit de retrouver les autres !

Florent aperçut ses amis allongés sur l’herbe, à l’entrée de la faculté.

- Bon, c’est pas tout ça, je retourne me chercher une bière au Pôle Etudiant, dit Jean.

- Encore ? Mais tu en viens ? Tu n’en a pas marre de boire des bières ? s’exclama Christophe.

- Mais, qu’est ce que cette remarque signifie ? Ce n’est que ma 10ème pinte ?

- Pfiouuuu… J’ai eu un mal fou à terminer dans les temps, soupira Florent tout en s’asseyant dans l’herbe. Ca a marché pour vous, ce sujet sur la peinture abstraite flamande du 17ème siècle ?

- Quoi ? OH NON ! J’avais totalement oublié que j’avais pris cette option! s’exclama Hélène.

- Ouais, ça peut aller… répondit Christophe. Mais je n’ai qu’une hâte, passer le partiel de Céramologie appliquée du Sud-est de la France, spécialité PACA ! VOILA un sujet passionnant.

- Moi j’ai parlé des mondes parallèles, ça marche à tous les coups, dit Pierre.

- Mais où est donc Simon ? demanda Florent.

- Il ne pouvait pas rester… Il est parti voir le FCN jouer contre Gueugnon à la Beaujoire.

- Oh.

Tout le monde se tût. Florent, Bélinor, Christophe, Hélène et Pierre somnolaient, profitant du soleil et du calme. Seul le glou-glou de Jean, qui avalait sa 11ème pinte, venait troubler le silence.

- Dîtes, ça intéresse quelqu’un de fouiller sur un chantier archéologique en bénévole cet été ? demanda Bélinor.

- Pourquoi pas, répondit Florent.

- OUAIS ! hurla Christophe.

- Carrément, dit Hélène.

- Non, dit Pierre, qui avait mal vécu sa première expérience de fouilleur bénévole.

- Je vais me chercher une bière, dit Jean.

- Allez quoi ! répondit Bélinor, On sera tous ensemble ça va être cool !!! On fera la fête le soir et tout !

- Comment veux-tu être d’humeur à faire la fête après une horrible journée passée à pelleter de la terre sous un soleil de plomb ou à patauger dans la boue… maugréa Pierre.

- Alors c’est d’accord, dit Bélinor emporté par l’enthousiasme. Nous irons tous ensemble faire un chantier cet été !

- Oui très bien, mais où ? demanda Florent.

- J’avais pensé à Brandes-en-Oisans. Vous savez ! Le village que l’on a étudié en cours d’archéologie médiévale la semaine dernière. C’est en Isère, dans la vallée de la Romanche… Ca vous tente ? demanda Bélinor.

- Pourquoi pas, répondit Florent.

- OUAIS ! hurla Christophe.

- Carrément, dit Hélène.

- Non, dit Pierre, qui venait de se rappeler une chose à propos de ce village.

- Heu… Je vais me chercher une bière, dit Jean.

- Alors c’est d’accord, dit Bélinor. Nous irons tous fouiller à Brandes-en-Oisans cet été ! Je vais les appeler tout de suite pour être sûr que nous ayons de la place !

Bélinor sortit son Ipod dernière génération et tapota le numéro sur son écran tactile.

- Allô ? répondit une voix caverneuse.

- Oui bonjour ! Je vous appelais au sujet des fouilles estivales sur le site archéologique de Brandes-en-Oisans ! Nous sommes un groupe d’étudiants et…

- Les fouilles ? Quelles fouilles ? Je ne connais pas de village nommé Brande-en-Oisans !

- Mais, vous…

- N’insistez pas monsieur. Au revoir ! répondit la voix.

Tut… tut… tut… L’homme avait raccroché.

- Alors ça ! C’est incroyable ! Il m’a dit qu’il ne connaissait pas ce village et il m’a raccroché au nez ! dit Bélinor, stupéfait.

- C’est étrange, répondit Florent, pensif.

- Pas si étrange que cela quand on pense que ce village… commença Pierre.

- Oui, en tout cas j’ai l’impression que notre petit voyage tombe à l’eau pour cet été ! soupira Hélène.

- Hum ! Hum ! fit une voix, dans leur dos.

Tous se retournèrent. Une femme d’âge moyen, cheveux noirs, lunettes sur le bout du nez, se tenait derrière eux. Il s’agissait de Justine Deck, leur professeur d’archéologie médiévale.

- Oh ! Bonjour madame Deck ! s’écria le groupe d’amis.

- Bonjour bonjour ! répondit Justine Deck. Vos partiels se sont bien déroulés j’espère !

- Oui nous… commencèrent les étudiants.

- Passons. Venons-en au fait. J’ai écouté, par mégarde, votre conversation. Vous souhaitez fouiller à Brandes-en-Oisans. C’est bien cela ?

- Oh oui madame ! répondit Bélinor, Mais c’est impossible ! Je viens d’appeler et la réponse semble négative !

Justine Deck éclata de rire.

- AHAHAHAHA ! Mais mon pauvre ami ! La réponse négative était évidente ! Brandes-en-Oisans fait partie des CFAM !

- Des… Des CFAM ? bredouilla Bélinor.

- Des Chantiers de Fouilles Archéologiques MAUDITS ! s’exclama Justine Deck.

Un frisson parcourut le groupe d’amis.

- Voila ! Je savais bien que ce village était louche… répondit Pierre. Après tout, ce n’est pas grave, au lieu de fouiller nous irons profiter du soleil à la plage ! A nous la baignade et les bières bien fraiches.

- Il y a cependant un moyen d’y fouiller. Poursuivit Justine Deck.

- Ah ? répondit le groupe d’amis en chœur.

- Eh oh ! Quelqu’un m’écoute ? demanda Pierre.

- Oui, reprit Justine Deck. Je ne peux cependant vous en dire plus pour le moment. Vous appartenez à une agence de voyages temporels, c’est bien cela ?

- Nous appartenions, répondit Florent. Notre agence a été fermée et la machine débranchée. Nous avons provoqué trop de paradoxes temporels lors de notre dernière mission.

- Peu m’importe les voyages temporels. Retrouvons nous tout de même à votre agence dans un mois, le 2 Juillet. Nous y serons plus à l’aise pour discuter du voyage. Prévoyez vos sacs à dos, nous partirons en minibus dans la foulée !

- C’est d’accord madame Deck, répondit Bélinor, à dans un mois !

*****

            2 Juillet. Jean, Hélène, Christophe, Bélinor, Florent, Pierre et Simon attendaient dans le hall de l’agence spatio-temporelle, sacs sur le dos.

- Eh bien alors ? Qu’est ce qu’elle fait à la fin ? s’exclama Bélinor, Elle nous a oublié ou quoi ? Nous avions rendez-vous à 8h et il est déjà 8h30… Avec tout le trajet en bus qu’on doit faire dans la journée, il ne faudrait pas partir trop en retard…!

- La voila ! dit Florent.

            En effet, la frêle silhouette de Justine Deck se dessinait à travers la vitre. La porte s’ouvrit.

- Bonjour bonjour ! C’est moi ! chantonna Justine Deck.

- Vous êtes en retard, marmonna Bélinor.

- Mais… Vous êtes à pied ? demanda Pierre.

- Où est le minibus ? demanda Florent.

- Tout le monde se calme ! s’écria Justine Deck en sortant un revolver. Bien, je vois que tout le monde est attentif. Il n’est pas question de minibus. Vous allez tous m’obéir bien sagement. Nous allons tous partir au XIVème siècle grâce à la machine temporelle !

- Mais je croyais que… commença Bélinor.

- Eh bien j’ai menti, coupa Justine Deck. Maintenant, tous dans la salle de la machine, nous partons immédiatement. Si quelqu’un n’est pas content, je le descends !

Un silence glacial accueillit cette dernière phrase.

- Allons ne faîtes pas cette tête ! s’écria Justine Deck. Haut les cœurs ! Nous allons bien nous amuser ! Bien. Jean, allez préparer la machine. Vous n’appuierez sur le bouton de retour qu’à la date prévue, dans 1 mois.

Tout le monde se retourna vers Jean.

- Je suis vraiment désolé les amis, soupira Jean. Elle m’a proposé mon poids en litres de bière et des places pour le match de rugby France-Irlande. Je n’ai pas pu refuser sa proposition.   

- Sale traître ! hurla Pierre.

- Comment ce mec peut-il encore être le chef de notre agence ? demanda Simon. Il nous trahit à chaque mission !

- Je peux aussi avoir des places pour le match madame Deck ? demanda Hélène.

- Ca suffit ! s’écria Justine Deck. Tout le monde à la machine, assez perdu de temps.

- C’est que… Le premier voyageur est toujours expédié à une époque différente des autres... dit Florent. 

- Ah oui… J’avais omis ce petit détail, soupira Justine Deck. Bien, l’un d’entre nous va devoir se sacrifier pour le bien de tous !

Justine Deck se retourna vers Christophe.

- Ce sera vous, dit Justine Deck.

- Quoi ? Mais pourquoi moi ? demanda Christophe. C’est parce que je suis céramologue c’est ça ? Je suis toujours exclu à cause de cela ! Pourquoi ne pas appeler un livreur de domino’s pizza comme d’habitude ?

- A vrai dire, ils refusent de venir nous livrer désormais. Ils se méfient… soupira Bélinor.

- C’est bon ! C’est bon ! J’ai compris, j’accepte de me sacrifier, dit Christophe.

Christophe entra dans la machine temporelle et s’assit sur le tabouret.

- De toute manière, la céramique d’époque médiévale ne m’intéresse pas, marmonna t-il, alors que Jean appuyait sur le bouton de départ.

Sous la menace de leur professeur d’archéologie médiévale, nos amis entrèrent un par un dans la machine temporelle. D’abord Hélène, puis Florent, Bélinor, Simon.

Vint le tour de Pierre.

- Dîtes madame… Je me sens un peu patraque et fiévreux… Je suis vraiment obligé de venir ?

- Allons, pas d’histoires mon garçon ! s’écria Justine Deck. Entrez dans cette machine.

- Bon bon… Je veux pas d’ennuis moi… soupira Pierre.

Justine Deck fut la dernière à entrer dans la machine.

*****

Chapitre 2 : Le monastère

- J’ai chaud… soupira Pierre.

- J’ai le mal des transports, gémit Florent.

- Quand est ce qu’on arrive ? demanda Bélinor.

- Je dois aller aux toilettes, dit Simon.

- Non mais sérieusement, il n’y a pas possibilité de m’avoir des places pour le match ? demanda Hélène.

- C’est pas bientôt fini de se plaindre derrière ? s’écria Justine Deck. Le voyage ne sera plus très long. Nous serons arrivés à Brande-en-Oisans demain.

Nos cinq amis étaient assis dans un chariot, tiré par deux bœufs. Justine Deck tenait les rênes. Il faisait un soleil de plomb et le chariot suivait une route poussiéreuse en cahotant.

- Regardez madame ! s’écria Hélène. Il y a quelqu’un qui nous fait signe là-bas, sur le bord de la route ! 

- C’est ma foi vrai, dit Justine Deck. Méfiance, nous devons éviter de nous faire remarquer.

Le chariot s’arrêta à hauteur de l’homme.

- Bien le bonjour, nobles voyageurs ! s’écria l’homme.

- Que voulez vous ? demanda Justine Deck.

- A vrai dire… Je ne suis qu’un humble marchand égaré, qui cherche un moyen de transport. Où allez-vous ? dit l’homme.

- Nous nous rendons à Brande-en-Oisans, dit Justine Deck.

- Oh oh oh ! Quelle coïncidence, je me rends justement à Saint-Pierre-le-Vieil ! C’est un petit village, sur la route de Brande-en-Oisans… Auriez-vous une place pour moi dans votre chariot ?

- Avez-vous de quoi payer le voyage ? demanda Justine Deck.

- Mais bien sûr, j’ai quelques pièces sur moi… Elles devraient suffire pour m’emmener à Saint-Pierre-le-Vieil…

- Je n’ai malheureusement plus de place dans mon chariot, répondit Justine Deck.

- Oooooooooohhhhh s’il vous plaît madame, dit Hélène. Nous n’allons tout de même pas laisser ce brave homme dans l’embarras…

- Bon bon… C’est d’accord, dit Justine Deck. Montez !

L’homme sauta à l’arrière du chariot.

- Bonjour la compagnie ! Je m’appelle Marc !

Marc serra la main de Florent, Bélinor et Simon. Puis, il se retourna vers Pierre.

- AtttttTTtttTttTTCHHAAAAAAAAA !!!!!!!!!!!!! S’exclama Pierre en éternuant dans ses mains. Enchanté monsieur Marc, dit Pierre en lui serrant la main, mon nom est Pierre.

- Tout le plaisir est pour moi, répondit poliment Marc. Si ma question n’est pas indiscrète, qu’allez-vous donc faire à Brande-en-Oisans ?

- Elle est indiscrète, répondit Justine Deck.

- Oh… très bien je n’insisterai donc pas, répondit Marc.

Le groupe continua son voyage quelques heures. Le soleil se couchait à présent et il devenait de plus en plus dur de distinguer la route. Justine Deck prit la parole.

- Bien, ca suffit pour aujourd’hui… Nous allons camper au pied de cet arbre pour la nuit. Nous repartirons demain matin, de bonne heure, dit Justine Deck.

On descendit du chariot. On fit un feu de camp et on prit le repas du soir. Enfin, tout le monde s’allongea.

- Bonne nuit ! s’exclama Marc avec un sourire malicieux.

Tous s’endormirent.

Hélène fut la première à se réveiller. Le soleil venait de se lever et du chariot et des bœufs, il n’y avait plus de trace.

- Tout le monde debout ! Le chariot à disparu ! cria Hélène.

- Quoi ? s’écria Justine Deck.

- Où est Marc ? demanda Pierre. Je ne le vois plus parmi nous !

- Je ne comprends pas, souffla Bélinor.

- C’est pourtant simple, maugréa Justine Deck. Votre nouvel ami à profité de l’obscurité pour s’enfuir avec le chariot et les bœufs ! Voila où mène la bonté ! Qu’importe ! Nous finirons le reste du trajet à pied voila tout.

*****

A bien des kilomètres de là, Marc, tenant les rênes du chariot, pensait :

- Je m’en veux tout de même de les avoir volés… Tous ces gens étaient forts sympathiques. Mais bon, la vie de voleur de grand chemin ne laisse pas de place pour les sentiments…

Marc éternua.

- Tiens, je me sens un peu patraque…

*****

Deux journées de marche s’étaient écoulées depuis le vol du chariot, et le groupe d’amis, mené par Justine Deck, avançait de plus en plus péniblement.

- J’en ai marre de marcher… soupira Florent. Mon sac pèse une tonne…

- Fallait pas le bourrer de barres chocolatées, moi j’ai tout pesé au gramme près, répondit Bélinor qui était adepte des randonnées. J’ai simplement emmené un sachet de cacahuètes en cas de dénutrition extrême, une boussole et ma lampe torche rechargeable à manivelle.

- Ouais… Bah te fais pas trop remarquer avec ça répondit Simon, on brûle les gens pour moins que ça à cette époque.

- L’après midi touche à sa fin madame Deck, dit Hélène, quand allons-nous établir le campement pour la nuit ?

- Regardez là-bas, répondit Justine Deck en pointant son doigt en direction du sud. J’aperçois une grande structure. Restons prudents, mais peut-être ne dormirons nous pas à la belle étoile cette nuit. Approchons nous pour voir de quoi il s’agit.

Le groupe poursuivit sa marche en direction du bâtiment. Ce dernier était entouré de larges murailles. Le groupe d’amis entra par la grande porte, et tous marchèrent le long d’une allée bordée d’arbres. A gauche de l’allée s’étendait une vaste zone de potagers. Tous s’arrêtèrent devant un petit jardin et attendirent que quelqu’un vienne à leur rencontre. Bientôt, un homme de forte corpulence s’approcha d’eux, un rictus sur le visage.

- Bienvenue étrangers. Que puis-je faire pour votre service ? demanda l’homme.

- Eh bien… Nous nous rendons à Brandes-en-Oisans. Nous avons marché tout le jour durant et sommes épuisés. Pouvez-vous nous offrir l’hospitalité pour cette nuit ? demanda Justine Deck.

- Voyons, quelle question ! Bien sûr, bien sûr ! répondit l’homme corpulent avec un sourire forcé. Vous pouvez rester pour la nuit, amis voyageurs.

- Mais… Où sommes-nous ? demanda Hélène à l’homme.

- Vous êtes au monastère de la sainte Vierge Marie, répondit l’homme. Je suis l’abbé de la communauté.

- Bien ! s’exclama Justine Deck. Voila qui est parfait ! Nous passerons donc la nuit dans votre charmant monastère, paisible et accueillant.

            Tous les moines avaient arrêté leurs activités et regardaient dans leur direction, d’un air soupçonneux. Devant l’air inquiet du groupe d’amis, l’abbé prit la parole.

- Ne faîtes pas attention à mes chers moines ! dit l’abbé. Ils ne sont guère habitués aux visiteurs et nous hébergeons déjà deux hommes d’églises étrangers à notre communauté. Tout cela perturbe un peu la tranquillité de notre vie mais tout se passera très bien, ne vous inquiétez pas. Maintenant suivez moi, je vais vous conduire à vos chambres. Ce sont de petites cellules de moines mais cela fera l’affaire pour cette nuit.

- Hum… soupira Justine Deck.

L’abbé s’inclina devant Justine Deck.

- A l’exception bien sûr de vous, ma dame, qui serez logée dans la chambre réservée aux hôtes de marque du monastère.

- Voila qui est mieux, dit Justine Deck.

- Gnagnagna… maugréa Hélène.

- Bien ! Suivez-moi ! dit l’abbé.

Pierre s’écarta du groupe et s’approcha d’un moine barbu, qui était occupé à couper des herbes du jardin avec une petite serpe.

- Bonjour mon bon moine… dit Pierre. Y-a-t-il un médecin parmi votre communauté ?

- Je fais office de médecin, je suis Séverin, l’herboriste, répondit le moine barbu.

- Oh ! Voila qui tombe très bien ! dit Pierre. Avez-vous une plante contre la grippe ?

- La quoi ? demanda Séverin.

- La grippe ! répondit Pierre. C’est une maladie très contagieuse qui provoque des maux de tête, de la fièvre et parfois des vomissements.

- Oh, je vois, veuillez me suivre mon ami. J’ai ce qu’il vous faut.

Pendant ce temps, l’abbé avait conduit le groupe d’amis à leurs chambres, au deuxième étage d’un grand bâtiment de forme rectangulaire.

- Voila, nous y sommes, dit l’abbé. Je vous laisse vous installer dans vos cellules. Ensuite, rejoignez nous au réfectoire, nous allons prendre le repas du soir. La règle prescrit de souper quand les ténèbres ne sont pas encore tombées.

- Où est le réfectoire ? demanda Hélène.

- Vous ne pourrez pas le rater, répondit l’abbé. Il s’agit du vaste édifice octogonal adossé à la muraille, à gauche de l’église.

L’abbé sortit. Tout le monde déposa ses affaires sur sa couchette, défit son sac et mit de l’ordre dans ses affaires.

-  Voila, je suis prêt, dit Florent.

- Moi aussi ! Allons manger ! dit Simon.

- Je suis mort de faim ! dit Bélinor. J’espère que le repas sera copieux !!! Cependant, une chose me tracasse… Où est Pierre ? Je ne l’ai pas vu depuis que nous sommes entrés dans le monastère.

- Je l’ai vu tout à l’heure, répondit Hélène. Il était trainé de force par deux moines à la carrure impressionnante.

- Oh, très bien. Me voici rassuré. dit Bélinor.

*****

- Mais ! Pourquoi suis-je enfermé ici, dans une cellule ? hurla Pierre.

- Calme-toi mon gars ! répondit un homme qui était assis en tailleur à ses côtés. T’es à l’infirmerie ici. Tu verras on est bien traité. Tout juste une petite saignée matin midi et soir.

- L’infirmerie ? demanda Pierre, la voix tremblante.

- Comme je te le dis ! Je m’appelle Jacques dit l’homme en lui tendant la main. Et toi quel est ton nom ?

- Je m’appelle Pierre, répondit Pierre, en lui serrant la main Pourquoi êtes-vous ici ?

- J’ai la lèpre, répondit l’homme.

- Et moi j’ai la peste ! Regarde mes bubons, dit une petite voix.

Il s’agissait d’un homme que Pierre n’avait pas remarqué jusqu'à alors. Il était blotti dans un coin et était recouvert d’un drap sale.

- Mon dieu ayez pitié de moi … JE VEUX SORTIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIR ! hurla Pierre.

*****

Justine Deck, les Dr. Germaine et leurs amis arrivèrent dans le réfectoire. La pièce était éclairée par de grandes torches. Tous les moines étaient debout devant les tables, immobiles, le capuchon sur le visage et les mains sous le scapulaire. Le groupe d’amis se dirigea vers une petite table placée au fond de la salle. L’abbé s’approcha de sa table, qui était placée perpendiculairement à celles des moines, sur une estrade. Bélinor jeta un œil aux deux feuilles de chou et à la maigre tranche de viande disposée dans son assiette.

- Bien ! s’écria l’abbé. Nous voici tous réunis pour le repas du soir. Comme vous avez tous pu le constater tout à l’heure, nous avons accordé pour cette nuit l’hospitalité à un groupe de voyageurs se rendant à Brandes-en-Oisans. Je compte sur vous pour les accueillir avec chaleur. Ils repartiront demain matin. Bien. Maintenant, prions le seigneur.

Tous les moines joignirent les mains et fermèrent les yeux. L’abbé reprit la parole.

- Bénissez nous, Seigneur, bénissez ce repas, ceux qui l’ont préparé, et procurez du pain a ceux qui…

L’abbé interrompit sa prière.

- Hé ! Oh ! J’en vois un qui ne prie pas là-bas !

Tout le monde se retourna vers Bélinor, qui avait déjà avalé la moitié de son assiette.

- Heu… Je… Je suis désolé ! dit Bélinor.

- Bon… peu importe… soupira l’abbé. Assez de prières pour le moment. Mangeons.

Tous les moines s’assirent et adressèrent un sourire de gratitude à Bélinor. Deux hommes entrèrent dans la pièce.

- Tiens Béli, regarde ces deux-là, là-bas ! Je parie que ce sont les deux autres voyageurs accueillis par le monastère ! dit Florent.

- Ah oui… Les deux hommes d’églises…, répondit Bélinor.

- Chut les gars ! chuchota Hélène. Ils viennent dans notre direction.

En effet, les deux hommes se dirigeaient vers la table des Dr. Germaine. Ils saluèrent le groupe d’amis et s’assirent aux deux places inoccupées. Le premier homme était d’âge mûr, il pouvait avoir cinquante ans. Il était maigre et de haute taille. Ses yeux étaient vifs et pénétrants, son nez était effilé et son visage allongé. Le second homme devait avoir à peine 20 ans, ses cheveux étaient bruns et son visage respirait la bonté. L’homme le plus âgé prit la parole.

- Vois-tu mon cher disciple, Saint François n’a pas réussi et je te le dis avec amertume. Pour réintégrer les exclus il devait agir à l’intérieur de l’Eglise, pour agir à l’intérieur de l’Eglise il devait obtenir la reconnaissance de sa règle, dont il sortirait un ordre, et un ordre, comme il arriva, aurait recomposé l’image d’un cercle, au bord duquel se trouvent les exclus. Et alors tu comprends, maintenant, pourquoi il y a les bandes des fraticelles et des joachimites, qui rassemblent aujourd’hui autour d’eux les exclus, une fois de plus.

Le jeune homme lui répondit.

- Mais, nous n’étions pas en train de parler de François, plutôt de l’hérésie comme produit des simples et des exclus.

- En effet, répondit l’homme plus âgé. Nous parlions des exclus du troupeau des brebis. Des siècles durant, tandis que le pape et l’empereur se déchiraient dans leur diatribes de puissants, ils ont continué à vivre en marge, eux les vrais lépreux dont les lépreux ne sont que la figure placée là par Dieu pour que nous comprenions cette admirable parabole, et disant « lépreux » nous comprenions : « exclus, pauvres, simples, déshérités, déracinés des campagnes, humiliés dans les villes ». Nous n’avons pas compris, le mystère de la lèpre est demeuré pour nous une obsession, parce que nous n’en avons pas reconnu la nature de signe. Exclus qu’ils étaient du troupeau ces derniers ont été prêts à écouter, ou à produire, toute prédication qui, se référant à la parole du Christ, mettrait de fait sous accusation le comportement des chiens et des pasteurs, et promettrait qu’un jour ils seraient punis. N’oublie pas : deus qui est sanctorum splendor mirabilis.

Bélinor bâilla à s’en décrocher la mâchoire.

- Nous vous ennuyons, peut être ? dit l’homme plus âgé en souriant.

- En fait vous savez, je crois que vous vous prenez trop la tête, répondit Bélinor. Jésus trouverait que vous voyez les choses avec beaucoup trop de sérieux... Il a inventé cette histoire de fils de dieu et de religion chrétienne parce qu’il s’ennuyait beaucoup…

- Qu’en savez-vous mon ami ? demanda l’homme âgé.

- Ne répondez pas, souffla Justine Deck.

- Il se trouve que j’ai sympathisé avec lui au cours d’un précédent voyage temporel, dit Bélinor. Quand je lui ai fait découvrir la musique métal, les MMORPG et la pratique de l’escalade en salle, il a bien vite oublié toutes ces histoires de religion… 

- Allez-vous vous taire à la fin ? s’exclama Justine Deck.

- Je ne vois pas pourquoi je me tairais, dit Bélinor. Jésus est un ami et…

Bélinor s’arrêta. L’homme d’âge mûr et son compagnon le regardaient avec des yeux ronds.

- Bien, soupira Bélinor. J’ai terminé mon assiette. Je vais sortir prendre un peu l’air et griller une cigarette.

- Soit, dit Justine Deck d’une voix basse. Mais de grâce, cessez de vous faire remarquer.

Bélinor sortit du réfectoire. Le guitariste soliste des Dr. Germaine sortit une cigarette de son paquet et l’alluma. La nuit était tombée et seuls les éclats de voix en provenance du réfectoire venaient troubler le calme ambiant. Dix minutes s’écoulèrent avant que Florent ne sorte à son tour.

- Pfffff… Les voila repartis sur un débat enflammé… Ils sont intarissables sur les sujets religieux… dit Florent.

- Je me demande qui sont ces deux hommes. Ils ont semblé ne pas vouloir se présenter…

- Oui c’est vrai, dit Florent. Voilà qui est mystérieux…

- Des nouvelles de Pierre ? demanda Bélinor.

- On m’a dit qu’il était à l’infirmerie, répondit Florent. Je vais aller voir ce qu’il en est. Je vous rejoins au dortoir au plus vite. A tout à l’heure.

                                                                                  *****

Florent s’éloigna du réfectoire et traversa le jardin du monastère. Il y poussait une multitude de plantes. Le jeune homme s’arrêta devant la porte du petit bâtiment qu’un moine lui avait désigné comme étant l’infirmerie. Florent frappa et entra. La pièce était petite et bien rangée, à l’exception peut-être de la table de travail du moine médecin sur laquelle était déposée bon nombre d’outils. Il n’y avait personne à l’horizon.

- Bonjouuuuuuuur ! dit Florent d’une voix enjouée. Il y a quelqu’un ?

- Florent !! C’est bien toi ? Dieu soit loué !!

C’était la voix de Pierre.

- Où est tu ? demanda Florent.

- Au sous-sol, je suis enfermé dans une cellule ! Pitié, fais-moi sortir ! supplia Pierre. L’herboriste s’est absenté quelques instants, c’est le moment rêvé pour une évasion !

- Mais je n’ai pas les clefs ! dit Florent.

- Elles ne doivent pas être bien loin ! Cherche sur sa table de travail !!!

Florent s’approcha de la table et commença à fouiller. Des clefs, il n’y avait pas l’ombre d’une trace.

- Hum ! Je peux vous aider ? demanda une voix.

Florent se retourna vivement. Un moine barbu se tenait dans l’embrasure de la porte les bras chargés de plantes médicinales. Ce dernier le regardait avec sévérité.

- A vrai dire, nous nous inquiétions pour notre ami Pierre… Pourquoi est-il enfermé dans une cellule ? demanda Florent.

- J’ai placé votre ami en quarantaine. Il a tous les symptômes du mal qui a décimé la moitié du royaume de France en deux jours. La première victime a été un marchand qui voyageait en chariot sur la même route que vous. Il a contaminé une ville entière et depuis, tout le pays est touché. Pierre pourra repartir avec vous demain matin, mais il devra passer la nuit à l’infirmerie. Je ne peux pas risquer une contamination de tout le monastère.

- Oh, très bien. Je vois,  dit Florent.

- Florent ? demanda la voix tremblante de Pierre. Qu’est ce qu’il te raconte ? Ne crois pas un mot de ce qu’il te dit ! Je vais très bien ! Je me sens beaucoup mieux maintenant !

- Ne vous inquiétez pas, tout ira très bien pour lui, dit le moine barbu. Mais à présent, je dois vous laisser. C’est l’heure de la saignée du soir pour mes petits pensionnaires.

- Alors, je vous souhaite une bonne nuit ! dit Florent en sortant de l’infirmerie.

Florent traversa à nouveau le jardin et passa devant le réfectoire. Il n’y avait plus un bruit. Tout le monde était parti se coucher. Il était sept heures du soir. Florent monta au deuxième étage du bâtiment principal et entra dans sa cellule.

Chapitre 3 : une nuit agitée.

Florent s’allongea sur sa couchette et ferma les yeux. Des éclats de voix provenaient de la cellule avoisinante, celle de Bélinor. Florent se leva, sortit dans le couloir et jeta un œil dans la cellule de son ami. Bélinor, Simon, Hélène et quatre moines étaient assis en tailleur sur le sol. Chacun tenait des cartes dans ses mains.

- Mais qu’est-ce que vous faites ? demanda Florent.

- J’initie les moines aux jeux d’argent ! dit fièrement Bélinor. Là, je leur apprends le poker. Et à vrai dire, je suis en train de les plumer.

Florent s’assit parmi eux. La soirée se poursuivit jusqu'à minuit, heure à laquelle les moines se levèrent.

- Bien. Mes chers amis, participer à cette soirée fut un plaisir, en particulier lorsque l’on pense à l’austérité de notre vie dans ce monastère. Mais il est l’heure pour nous d’aller nous coucher.

- Nous allons en faire de même, dit Hélène. Nous nous levons tôt demain et une dure journée de marche nous attend.

Les quatre moines sortirent, suivis de Simon et Hélène et Florent qui partirent se coucher dans leur cellule. Florent s’allongea sur sa couchette, ferma les yeux et pensa aux événements de la journée : le vol du chariot par Marc, la longue marche le long de la route menant à Brandes-en-Oisans, l’arrivée au monastère, le dîner en compagnie des deux mystérieux hommes d’église… Une demi-heure passa. Des ronflements venaient de la cellule de Simon. Florent ne trouvait pas le sommeil. Il n’y avait pas un bruit dans la cellule de Bélinor. Peut-être ne parvenait-il pas à dormir lui non plus. Florent voulut en avoir le cœur net.

- Béli ? Tu dors ? demanda Florent.

- Nan, répondit Bélinor.

- Moi non plus… A vrai dire, j’ai trop faim pour dormir… soupira Florent.

- De même. Je donnerais toute ma fortune pour un steak frites…

- Dis… Et si… commença Florent.

- Ouais ?

- Et si on sortait et qu’on allait dans les cuisines, on devrait trouver quelque chose à manger.

- Ca c’est une idée ! Allons-y !

Les deux Dr Germaine sortirent de leur cellule et du bâtiment. Ils traversèrent à pas de loups la grande cour de l’abbaye et prirent la direction du grand Edifice octogonal qui abritait le réfectoire et les cuisines. Il faisait nuit noire, la lune brillait dans le ciel étoilé et pas un bruit ne venait troubler le silence de l’abbaye. Florent et Bélinor arrivèrent devant la porte. Celle-ci était entrouverte.

- C’est louche… cette porte ouverte, dit Florent.

- Allons allons… Le moine responsable aura oublié de fermer la porte… A vrai dire, ça tombe bien pour nous ! Sans cela, nous n’avions plus qu’à retourner à nos cellules.

- En effet, tu as raison. Entrons, dit Florent.

Les deux Dr Germaine entrèrent dans le réfectoire… Les torches étaient bien sûr éteintes et on ne distinguait presque rien. Florent et Bélinor se faufilèrent dans les cuisines.

- Comme les cuisines sont grandes ! souffla Florent ? Regarde toutes ces casseroles ! Tous ces couverts !!

- Ce ne sont pas les ustensiles de cuisine qui m’intéressent… dit Bélinor, qui commençait à ouvrir les placards.

- Chut ! dit Florent. J’ai entendu un bruit !!

- Mais nooooooon… Tu te fais des idées… L’obscurité favorise notre ouïe… On prête plus attention aux bruits nocturnes…

- Je te jure que j’ai entendu quelque chose ! dit Florent.

- Oh regarde !!! Un énorme saucisson ! Dire qu’on nous a servi du chou et une lamelle de jambon au repas du soir !

- Plus un bruit ! chuchota Florent. Il y a quelqu’un dans le réfectoire.

Les deux Dr. Germaine jetèrent un œil dans la pièce voisine. Leurs yeux s’étaient habitués à l’obscurité et ils aperçurent une silhouette traverser le réfectoire et prendre un large escalier au fond de la salle.

- Un moine ? demanda Bélinor. Celui qui a laissé la porte entrouverte tu penses ?

- Peut-être est-ce lui en effet… C’est louche ! dit Florent. Qui pourrait se balader la nuit dans le monastère…

- Quelqu’un d’affamé comme nous, peut-être ?

- Je veux en avoir le cœur net ! Suivons-le !

- D’accord, mais laisse moi au moins le temps de prendre le saucisson ! dit Bélinor, dont l’estomac commençait à être bruyant.

-  Silence à la fin ! Voici encore quelqu’un qui entre dans le réfectoire! chuchota Florent.

Cette fois ce n’était pas un, mais bien deux personnages qui entrèrent à pas de loup dans le réfectoire. Les deux ombres prirent le même chemin et empruntèrent l’escalier.

- De plus en plus mystérieux, dit Florent. Voilà que notre premier homme est suivi par deux autres moines ! Suivons-les et voyons ce qui se trame par ici.

Florent et Bélinor sortirent des cuisines, traversèrent le réfectoire et montèrent à l’étage.

Les deux Dr. Germaine entrèrent dans une vaste salle, aux nombreuses fenêtres : la pièce devait être très lumineuse pendant la journée. Les voûtes étaient soutenues par de robustes pilastres. Il y avait là un grand nombre de petites tables, sur lesquelles était posé du matériel d’écriture : plumes et parchemins…

Il n’y avait pas un bruit dans la salle, à part peut-être Bélinor, mâchonnant le saucisson.

- Mais, où chommes nous donc ? demanda t-il, la bouche pleine.

- Dans le scriptorium, dit Florent. C’est le lieu où les moines copient les textes…

- Comment tu sais ça toi ?

- Je l’ai lu dans un roman… En tout cas, il n’y a personne dans cette salle, dit Florent. Ils ne se sont tout de même pas volatilisés !

- Regarde, au fond à gauche ! Une porte ! C’est la seule issue, ils ne peuvent qu’être passés par là.

Les deux Dr. Germaine se faufilèrent entre les petites tables de travail et s’approchèrent de la porte. Florent se colla contre elle et tendit l’oreille.

- Je n’entends rien… Pas un bruit… Je me demande où cela mène…

- Ouvrons et nous le verrons.

Florent posa la main sur la poignée, entrebâilla la porte et jeta un coup d’œil.

- Je ne vois pas bien, mais je crois qu’il n’y a personne à l’horizon.

- Alors allons-y ! Entrons !

Florent ouvrit la porte tout à fait et les deux amis entrèrent dans la pièce. Il n’y avait pas de fenêtres. La salle avait sept côtés et ne semblait pas très vaste. Sur quatre des sept parois s’ouvrait, entre deux colonnettes, un passage surmonté d’un arc en plein cintre.

- Pouah ! Ca sent le renfermé ! dit Florent.

Le long des murs étaient placées de grandes armoires, remplies de livres, très légèrement poussiéreux. 

- Nous sommes donc dans la bibliothèque du monastère… dit Bélinor.

- Soyons prudents… Nos mystérieux bibliophiles nocturnes ne sont peut être pas loin…

Florent et Bélinor franchirent l’un des passages et entrèrent dans une première pièce. Il y avait une fenêtre et sur un écriteau était écrit : Super Thronos viginti quatuor.

- Je me demande ce que ce panneau signifie… demanda Florent.

- Cela veut dire : « La mort guette ceux qui pénètrent dans la bibliothèque sans autorisation »… dit Bélinor.

- Tu es sérieux ? demanda Florent qui commençait à être inquiet. Tu as étudié le latin ?

- Non je plaisantais, je n’ai jamais fait de latin… Mais procédons par déduction, après tout le français est une langue latine. Le premier mot par exemple, « Super » ne laisse pas de place au doute. Il s’agit de quelque chose de super. Le second, « Thronos », doit vouloir dire « trône ». Ca parle probablement d’un super trône…

- Hum… soupira Florent, navré.

- Bref. Et si nous entrions dans la seconde pièce ?

Les deux amis entrèrent dans la seconde pièce (avec fenêtre, armoires et table centrale…), puis dans la troisième. Cette dernière était vide de livres. Il y avait trois portes. Celle par laquelle les deux amis étaient entrés, l’autre qui donnait sur la pièce heptagonale déjà visitée, et une troisième qui donnait sur une nouvelle pièce, sans porte.

- Nous allons devoir revenir sur nos pas… Nous sommes bloqués, soupira Florent.

- Je crois que je commence à comprendre la logique de cet édifice. Cinq pièces quadrangulaires avec une fenêtre chacune, qui tourne autour d’une pièce heptagonale sans fenêtre. C’est élémentaire. Nous sommes bel et bien dans la tour orientale, chaque tour présente de l’extérieur cinq fenêtres et cinq côtés ! Le compte y est Florent !!!!!

- Heu… Je n’ai rien compris, dit Florent.

- Peu importe, fais-moi confiance ! Revenons dans la première pièce et voyons où mènent les deux autres portes… dit Bélinor. Je devrais pouvoir m’orienter facilement.

Les deux Dr. Germaine revinrent dans la première pièce et entrèrent dans les pièces encore non explorées. Au fur et à mesure que les deux amis quittèrent la tour, tout devint plus confus. Certaines pièces avait deux portes, d’autres trois… Toutes avaient une fenêtre, une table centrale et le même type d’armoires… Les livres semblaient tous identiques… Seuls les écriteaux permettaient de se repérer : « In diebus illis », « Primogenitus mortuorum », « Apocalypsis lesu Christi »…

Tout d’un coup, Florent s’arrêta.

- Oh !!! Regarde devant nous !!! s’écria Florent.

Deux géants, aux corps onduleux, s’avançaient vers eux. Les deux Dr. Germaine s’arrêtèrent net, figés par l’effroi. Les deux colosses en firent de même. Plus personne ne bougeait. Soudain, Bélinor éclata de rire.

- Qu’est ce qui t’arrives ? chuchota Florent. Tais-toi donc !

- Mais regarde mieux ! Ce n’est qu’un miroir déformant qui nous a tant fait peur ! Tous les moyens sont bons pour effrayer le visiteur !

            Florent et Bélinor s’avancèrent vers la plaque de verre. Cette dernière renvoyait leurs deux images, qui changeaient de forme et de hauteur, selon la distance à laquelle ils se trouvaient. Rassurés, les deux amis poursuivirent le chemin dans le labyrinthe.

- Tu arrives à te repérer ? demanda Florent à Bélinor.

- Mmmm… mmmm… Oui oui ne t’inquiète donc pas… dit Bélinor d’une voix sourde.

- On est complètement perdu ? C’est ça ?

- Oui… soupira Bélinor.

- C’est ma faute… dit Florent. J’ai été trop curieux, nous n’aurions pas dû suivre ces moines dans l’Edifice… Comment allons-nous retrouver la sortie désormais ?

- Regarde là-bas ! Une lueur !! Quelqu’un avec une lampe tu crois ? dit Bélinor.

- Allons voir. Nous n’avons plus trop le choix de toute façon, dit Florent.

Florent et Bélinor traversèrent plusieurs pièces… s’avançant vers la lumière avec une grande prudence. Il n’y avait personne dans la pièce. Une espèce de lampe était posée sur la table. On aurait dit un encensoir.

- N’approchez pas cette lampe !! s’écria une voix derrière eux. Elle diffuse de la drogue et provoque des visions !

            Les deux Dr. Germaine se retournèrent prestement. Deux hommes les regardaient fixement.

- Mais !! Je vous reconnais s’écria Bélinor. Vous êtes les deux hommes d’églises avec qui nous avons discuté lors du repas du soir !!

- En effet, dit l’homme le plus âgé. Que faîtes vous ici ?

- Hem… toussota Florent. Eh bien… Nous avions un petit creux et nous nous sommes rendus aux cuisines. Nous avons alors aperçu un homme se diriger vers le scriptorium. Nous avons décidé de le suivre quand deux autres silhouettes sont apparues…

- Oui… dit l’homme, c’était nous. Nous suivions également ce moine… Malheureusement nous avons perdu sa trace dans la bibliothèque… Et nous sommes à présent perdus, comme vous l’êtes également je suppose ?

- C’est effectivement le cas, soupira Florent. Mais… Si nous profitions de cette embarrassante situation pour nous présenter, enfin. Je m’appelle Florent.

- Et moi Bélinor.

- Je suis enchanté de faire votre connaissance mes jeunes amis, dit l’homme âgé. Mon nom est Guillaume de Baskerville. Et voici mon disciple…

- Adso, pour vous servir, répondit le jeune homme en souriant.

- Vous savez, il se passe dans ce monastère des choses fort étranges, dit Guillaume.

- Ah ? demanda Florent.

- Un moine est mort et nous avons été chargés de l’enquête. Mais le problème pour le moment est tout autre. Nous devons trouver un moyen de sortir de ce labyrinthe. Tentons de retrouver la salle heptagonale, mes amis.

Florent, Bélinor, Guillaume et Adso circulèrent dans la bibliothèque pendant plus d’une heure, passant de salles en salles… Au bout d’un certain temps, alors que tous perdaient espoir et que Guillaume lui-même ne parlait plus que d’attendre le lever du jour et l’arrivée du moine bibliothécaire, le petit groupe retrouva miraculeusement la première salle. Tous traversèrent le scriptorium, puis le réfectoire et se retrouvèrent à l’air libre. Guillaume prit la parole.

- Bien, mes amis. Retournons à nos cellules. Pas un mot de ce qui s’est passé cette nuit, dit Guillaume.  Nous devons rester discrets, l’abbé nous avait interdit de pénétrer dans la bibliothèque. Demain, nous tâcherons de découvrir l’identité de ce mystérieux moine que nous avons suivi cette nuit… En attendant, bonne nuit.

Florent et Bélinor saluèrent une dernière fois Guillaume et Adso et retournèrent au deuxième étage du bâtiment rectangulaire. Florent s’allongea sur sa couchette et dit à Bélinor :

- Dans cinq minutes, je dormirai profondément…

- Et moi donc, répondit Bélinor. Toutes ces émotions m’ont épuisé…

Le silence se fit. Dix minutes passèrent quand soudain…

- Debout la dedans ! C’est Matines ! Tous à l’église ! hurla un moine qui passait devant la cellule de Bélinor.

- Hein ??? Matines… Qu’est ce que c’est que ça ? demanda Bélinor d’une voix ensommeillée.

- Mais, d’où sortez-vous ? C’est la première prière de la nuit !!! Il est 2h30 !

- Parce qu’il y en a d’autres ?

- Oui bien sûr… Laudes entre 5h et 6h du matin et Prime à 7h30 ! répondit le moine.

- Super. Je sens que nous allons passer une merveilleuse nuit, soupira Bélinor.

Ce dernier sortit de sa cellule et rejoignit ses amis, Hélène, Simon et Florent, qui l’attendaient à la sortie du bâtiment. Tous suivirent le cortège de moines, entrèrent dans l’église et s’assirent sur les bancs. L’abbé, devant l’autel, commença la prière.

- Venez, crions de Joie pour le Seigneur ! Crions de joie pour le Seigneur ! Acclamons notre rocher, notre salut ! Crions de joie pour le Seigneur ! Allons à lui en rendant grâce ! Crions de joie pour le Seigneur ! Par nos hymnes et nos fêtes acclamons…

- RRRzzzZZZzzzzz…

Tout le monde se retourna vers Bélinor, qui s’était endormi. Simon lui donna un coup de coude.

- Je…! Hein ? dit Bélinor.

- Bon… Si vous y mettez de la mauvaise volonté à chaque fois, on n’y arrivera jamais… soupira l’abbé.

Soudain, des clameurs s’élevèrent en dehors de l’édifice. Trois porchers entrèrent. Ils semblaient terrorisés. Ils se dirigèrent vers l’abbé et lui murmurèrent quelque chose. L’abbé tenta de les calmer d’un geste. Il ne souhaitait apparemment pas interrompre l’office. Mais trois hommes entrèrent à nouveau dans l’église en criant « c’est un homme mort ! » ou encore « c’est un moine, n’as-tu pas vu ses chaussures ! ». L’abbé sortit, suivit du cellérier, de Guillaume de Baskerville, d’Adso et des autres moines.

- Mais qu’est ce qui se passe ? demanda Simon.

- Allons-voir ! Suivons-les ! répondit Bélinor.

Le ciel était maintenant clair. Tout le monde était regroupé autour d’une grande jarre utilisée pour recueillir le sang des cochons. De la jarre semblait sortir un objet de forme cruciforme. C’était deux jambes humaines. Un homme avait été enfoncé tête la première dans la jarre remplie de sang. L’abbé ordonna que l’on retire le cadavre de l’homme (car l’homme ne pouvait être encore vivant, dans cette position). Les porchers, d’abord hésitants, s’approchèrent et sortirent l’homme de la jarre. Le visage de  l’homme, recouvert de sang solidifié, était méconnaissable. Un servant s’avança, un seau d’eau à la main qu’il versa sur le malheureux moine. Un autre lui essuya le visage.

- C’est Vénantius ! s’écria un moine.

- Quelle tragédie ! gémit un autre.

- Mais… Qu’a-t-il pu lui arriver ? demanda un troisième.

- Il est possible qu’Adelme se soit suicidé, dit Guillaume de Baskerville en fixant le visage du moine décédé, mais certes pas celui-ci. Et on ne peut penser qu’il se soit hissé par hasard jusqu’au bord de cette jarre et qu’il soit tombé par erreur.

L’abbé s’approcha de Guillaume et lui glissa quelques mots. Florent, qui était placé à proximité, entendit la conversation.

- Frère Guillaume, comme vous le voyez, il se passe quelque chose dans l’abbaye, quelque chose qui requiert toute votre sagesse. Mais je vous en conjure, faites vite !

- Etait-il présent dans le chœur durant l’office ? demanda Guillaume, pointant le cadavre du bras.

- Non, répondit l’abbé. J’avais remarqué que sa stalle était vide.

- Aucun autre n’était absent ?

- Je n’ai pas l’impression. Je n’ai rien remarqué d’autre.

- Béranger était-il à sa place ?

- Il y était, sa place se trouve au premier rang, presque à ma droite.

- Naturellement, dit Guillaume, tout ceci ne signifie rien. Je ne crois pas que, pour entrer dans le chœur, quelqu’un soit passé derrière l’abside et donc le cadavre pouvait déjà se trouver là, depuis plusieurs heures, au moins à partir du moment où tout le monde s’en était allé dormir.

- Certes, les premiers servants se lèvent avec l’aube et c’est pour cela qu’ils ne l’ont découvert qu’à présent.

Guillaume se rapprocha du cadavre, et se pencha vers lui. Il essuya à nouveau le visage de Venantius avec le chiffon imbibé d’eau utilisé précédemment par le servant. Autour de lui se regroupaient les moines, formant un cercle bruyant. L’abbé tentait en vain de les calmer. Séverin, qui était responsable des corps de l’abbaye, se fraya un passage dans l’assemblée et rejoint Guillaume. Florent, curieux, s’approcha de nouveau.

- As-tu jamais vu un noyé ? demanda Guillaume à Séverin.

- Plus d’une fois, répondit Séverin. Et si je devine ce que tu veux dire par là, ils n’ont pas ce visage, leurs traits sont gonflés.

- Alors l’homme était déjà mort quand on l’a flanqué dans la jarre.

- Pourquoi aurait-on dû faire cela ?

- Pourquoi aurait-on dû le tuer ? Nous sommes en présence de l’œuvre d’un esprit altéré. Mais pour l’heure, il faut voir si le corps présente des blessures ou des contusions. Je propose de transporter le corps à l’infirmerie, de le déshabiller, le laver et l’examiner. Je te rejoins tout de suite.

Guillaume et Adso s’éloignèrent. Le corps fut transporté à l’infirmerie par deux porchers, suivis de l’herboriste. Les moines, sur ordre de l’abbé, rentrèrent dans le chœur. Florent rejoignit ses amis, qui se tenaient un peu à l’écart, vers le potager.

- Eh bien ! On dirait que des événements bien étranges se déroulent dans ce monastère, dit Florent.

- Oui ! Quelle horreur, dit Hélène. Pauvre homme !

- Ce pourrait-il que cet homme soit celui que nous avons suivi dans la bibliothèque cette nuit ? demanda Bélinor.

- Que vous avez quoi ? demanda Simon, abasourdi.

- C’est fort probable, répondit Florent. Mais je n’ai qu’une hâte, que nous reprenions notre route et quittions cet endroit dangereux. Un tueur rôde dans les environs et je n’ai guère envie de croiser son chemin.

- Tout le monde est parti. Retournons dans nos cellules et tentons de nous rendormir, dit Bélinor.

Bélinor, Florent, Simon et Hélène retournèrent dans leurs chambres et s’allongèrent sur leur paillasse. Le sommeil fut dur à trouver cette nuit là. Les quatre amis furent réveillés à 5h pour la prière de Laudes, puis à 7h30 du matin par Justine Deck. Leur professeur avait semble t-il passée une excellente nuit.

- Debout tout le monde !! Nous reprenons la route.

- Quoi ???? Déjà… gémit Bélinor.

- Comment « déjà » ? Ca fait douze heures que vous êtes au lit !

- Mais non ! commença Florent. Nous avons…

- Bien ! Ca suffit ! Tout le monde dans la cour, devant l’église, sac sur le dos. Nous repartons ! Nous arriverons à Brandes-en-Oisans dans le milieu de l’après midi. Assez de temps perdu.

Tout le monde prépara son sac et descendit dans la cour principale. Pierre était déjà là. Son teint était pâle et de gros cernes soulignaient ses yeux. Justine Deck était à ses côtés, en pleine discussion avec l’abbé.

- Encore merci de votre accueil. Nous allons désormais reprendre la route, dit Justine Deck.

- Je suis heureux d’avoir pu vous offrir l’hébergement pour la nuit, répondit l’abbé.

- Monsieur l’abbé, voici l’âne que vous avez demandé.

L’homme qui avait parlé était un jeune moine. Il tenait dans la main une corde attachée au cou d’un petit âne.

- Ah oui… dit l’abbé. Il ne serait pas correct qu’une femme de votre qualité marche. Je vous fais donc cadeau de cet âne pour le voyage qui vous attend jusqu'à Brandes-en-Oisans.

Justine Deck remercia l’abbé et fit signe à ses étudiants qu’il était temps de partir. Le petit groupe franchit la porte principale du monastère et commença à s’éloigner. Florent se retourna une dernière fois. Deux hommes lui faisaient de grands gestes d’au revoir. Il s’agissait de Guillaume et d’Adso. Florent s’arrêta, les salua de la main et reprit sa marche.

Chapitre 4 : Brandes-en-Oisans.

La marche fut très rude vers Brandes-en-Oisans. Le village était situé sur le plateau de l’Alpe d’Huez, à environ 1800 mètres d’altitude. Ainsi, lorsque le groupe arriva aux portes du village, Florent, Hélène, Simon et Pierre s’écroulèrent sur le sol, épuisés.

- Je ne sais pas vous, mais j’ai fais un excellent voyage, dit Justine Deck, dont le teint était frais et reposé.

- Oui… Ce petit échauffement était sympa… dit Bélinor, qui en redemandait.

Pierre se releva et jeta un coup d’œil au village : maisons de pierre semi-enterrées, petits jardins… Au loin, Pierre aperçut une église et un château.

- Oh… On vient à notre rencontre, dit Justine Deck.

En effet, un homme barbu suivi d’un cortège d’autres hommes, venait dans leur direction.

- Bien le bonjour, gentils messieurs. Mon nom est Justine De Deck, je suis une noble venue de la capitale pour faire une étude sur votre village. Vous êtes le chef du village je présume ?

- En effet. Et eux… C’est qui ? dit l’homme barbu, d’un ton bourru en désignant le reste du groupe.

- Ce sont mes serfs.

- Quoi ? Mais pas du tout ! Nous… commença Simon.

- Très bien ! Nous avons justement besoin de main-d’œuvre dans notre mine d’argent ! J’espère qu’ils ne rechignent pas à la tâche ! Allez hop ! Tout le monde me suit. Prenez un marteau et un burin, nous partons pour la mine.

- Dans quel pétrin on s’est encore fourré… soupira Pierre.

L’homme se tourna à nouveau vers Justine Deck.

- Quant à vous ma dame, vous serez l’hôte de marque de notre village, pendant toute la durée de votre séjour. Ma femme va vous mener à l’habitation des hôtes. Vos serfs vous rejoindront à la fin de la journée.

- Mais... Pourquoi elle est toujours privilégiée... C'est injuste! marmonna Hélène.

- Voila qui est parfait ! Bon après-midi à tous ! dit Justine Deck avec un sourire malicieux.

Tout le monde suivit le chef du village à travers la montagne, jusqu'à la mine d’argent.

- Allez ! Au travail jusqu'à ce soir ! cria le chef.

- Je présume qu’il est inutile de vous demander une petite pause à 16h pour prendre un café et un bout de quatre-quarts ? demanda Pierre, qui avait gardé un bon souvenir des pauses du chantier archéologique de Paule en Bretagne.

Le chef le regarda avec des yeux ronds.

- Ouais je vois. Oubliez ce que j’ai dit… soupira Pierre.

Ils se mirent tous au travail. Chacun martelait la roche avec un burin. Au bout de deux heures, Pierre, épuisé, posa son burin sur le sol et s’assit sur le sol.

- Eh ! Pierre ! Qu’est ce que tu fais ! Tu va mettre le chef en colère ! dit Simon.

- Pffff… Stop ! J’en peux plus. Je fais une pause, tant pis si le chef me fait une réflexion… souffla Pierre.

Pierre jeta un œil autour de lui. Tout le monde était occupé à travailler. Un homme le regardait fixement. Celui-ci le prit à partie.

- Eh toi ! Pourquoi tu me regardes ? cria l’homme.

- Je vous demande pardon ? demanda Pierre.

- Tu me regardes ! Pourquoi ? Tu cherches la bagarre ? Tu veux te battre ?

- Mais pas du tout ! Je ne comprends pas… dit Pierre, tentant de calmer le jeu.

Peine perdue. L’homme, enragé, sauta sur Pierre.

- A l’aide ! cria Hélène à l’attention des autres habitants du village. Votre ami est devenu fou !

Il fallut l’intervention de cinq hommes pour réussir à maîtriser le fou furieux. Les cinq hommes, tenant l’agresseur fermement, retournèrent au village avec lui. Pierre était tout pâle et tremblait.

- Je ne comprends pas… Je ne comprends pas !!!! Je n’ai rien fait !!! répétait Pierre.

- Ne faîtes pas attention, dit le chef du village. Tom est parfois un peu agressif, mais c’est un brave garçon ! Bon, ça suffit, tout le monde reprend le travail.

Trois heures passèrent. La nuit commençait à tomber. Le chef prit la parole à nouveau.

- La journée est terminée ! Tout le monde range son matériel !

- Enfin… dit Florent, ruisselant de sueur.

- Déjà ? dit Bélinor, frais comme un gardon.

Tout le monde reprit le chemin du village. Florent, Bélinor, Pierre, Simon et Hélène furent conduits à la maison où les attendait Justine Deck, installée dans une chaise près d’un feu de cheminée. Leur professeur était plongée dans des livres d’histoire médiévale. Après le repas, tous s’assirent près du feu. Simon prit la parole. 

- Je dois aller aux toilettes. Je vous rejoins tout de suite.

- Ne t’éloigne pas trop, dit Florent, il ne faudrait pas que tu tombes sur l’enragé de tout à l’heure. En plus, il fait nuit noire désormais.

- Ne t’inquiète pas ! Je suis là dans cinq minutes.

Un silence se fit. La journée avait été dure et tout le monde avait besoin de repos. Justine Deck se tourna vers le groupe d’amis.

- Comment s’est passée la journée de travail ? Avez-vous remarqué quelque chose de particulier ?

- Un homme a cherché querelle à Pierre tout à l’heure, dit Hélène. Il avait l’air un peu dérangé…

- Cela ne m’étonne pas !!! Il est possible que cet homme soit touché par le saturnisme, une intoxication au plomb. Il a probablement bu de l’eau dans le quartier de la source. C’est là que les gens de ce village lavent le plomb argentifère, dans des paniers en osier. En fait, tout le monde y boit, il y a fort à parier que le nombre de victimes est énorme.

- Mon Dieu… Il faudrait les avertir de ce danger… dit Florent. Ils doivent tous être malades…

Une demi-heure passa. Florent se leva et alla à la fenêtre.

- Mais… Qu’est ce qu’il fabrique ? Il est parti depuis plus d’une demi-heure maintenant !

Justine Deck, qui n’avait pas écouté Florent, se leva à son tour. Son visage était grave.

- Le moment est venu pour moi de vous révéler le véritable but de notre voyage ici. Notre but est SCIENTIFIQUE. Il se trouve qu’au XVème siècle, l’évêque de Grenoble parle d’événements sinistres survenus à Brandes-en-Oisans. Le débat est sans fin parmi les spécialistes médiévistes. Les hypothèses sont nombreuses et nous sommes là pour définir la nature exacte de ces événements. Certains parlent d’un problème d’évacuation des eaux souterraines, d’autres d’un refroidissement climatique ayant entrainé l’abandon du site… Quant à moi, je dirais qu’il s’agit tout simplement de…

Simon entra en catastrophe dans la pièce, poussa la porte et ferma le lourd cadenas.

- Simon !!! s’écria Hélène.

- Enfin ! Nous étions morts d’inquiétude ! dit Florent.

- Ou étais-tu donc passé ? demanda Pierre.

- Vous n’allez pas me croire !!! Vous n’allez pas me croire !! hurla Simon. Tous les habitants du village se sont transformés en…

- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA ! hurla Hélène. Un zombie !!! Là, par la fenêtre !!!

- En fait, ils sont environ deux cents précisa Simon. J’ai pu leur échapper par miracle.

BOUM ! BOUM !

La porte commençait à craquer sous les coups des morts vivants.

- Des zombies… marmonnait Justine Deck en prenant des photos. Voilà qui est original, cette théorie n’avait jamais été proposée. Je serai l’attraction du prochain colloque.

- On va tous y passer, gémit Pierre.

- C’est génial, on se croirait dans un film de Romero ! s’exclama Simon.

*****

couverturebrandes1

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Quelques réactions...

Umberto Eco : Ce livre est une honte ! C’est un plagiat intégral !!!

Castor Mag’ : Le personnage du grand père Castor est fort sympathique, mais ses apparitions dans le récit demeurent trop rares. 

George Romero : Le début est un peu lent mais à partir du chapitre 4, tout s’emballe ! C’est formidable ! J’achète les droits d’adaptation de cet ouvrage !

*****

Lachez vos com's les amis (oui je sais j'abuse, j'ai été absent presque un an sur ce blog... mais vous avouerez que lorsque je reviens, je fais pas semblant...).

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Commentaires
G
Ce qu'il y a de bien quand on relit tout ça dans le demi-sommeil, c'est qu'on se surprend à imaginer encore plus délirant : "Dr. Germaine, le disque qui explose les ventes" !
F
Que veux tu ma pauvre Marion... On ne peut être parfait... J'ai pourtant essayé de respecter la psychologie des personnages... <br /> Je suis heureux que tu ai apprécié cette histoire !
M
très très bon tout ça, mais je trouve qu'il manque les fameux "bah" introductifs de Pierre, et quelques longueurs de cheveux à Hélène!
M
très très bon tout ça, mais je trouve qu'il manque les fameux "bah" introductifs de Pierre, et quelques longueurs de cheveux à Hélène!
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